« Et Moïse les envoya (les explorateurs)… ils étaient tous, des personnalités éminentes » (Bamidbar 13,3), cela signifie que tous étaient des justes et des dirigeants d’Israël. « Oh mon peuple, ceux qui te dirigent t’ont induit en erreur, et ont détruit la voie de tes chemins » (Isa. 3,12) : car lorsque ceux qui dirigent le peuple fautent, tous les autres les suivent. (Zohar ha Kaddoch III 20b) En conséquence de quoi ils moururent dans le désert ainsi que tous ceux qui suivirent leurs conseils pernicieux.
Ces princes d’Israël, ces sommités spirituelles se revendiquent comme porte-parole d’une tourbe humaine, nouvellement libre. Leur pouvoir de domination s’avance masqué, il prend l’aspect plus ou moins trompeur d’une des formes du pouvoir de direction ou de leur combinaison. Ce dernier type de pouvoir est l’idéal régulateur indispensable de la vie politique, ils doivent apprendre à l’exploiter, ils doivent en permanence s’y référer dans leurs discours. L’intérêt supérieur de la nation, du peuple, de l’entreprise sont censés commander leurs décisions et leurs actions, même et surtout lorsqu’ils font usage de la force ou de la menace de mort ou d’exclusion.
La faute des explorateurs laisse percevoir deux faiblesses de base: elle montre comment le peuple a été manipulé et comment il n’a pu transcender son matérialisme et répondre à la parole divine. Elle prouve aussi que les enfants d’Israël ont été mal éduqué et mal orienté, d’où une mauvaise interprétation du sens de leur tâche et de leur mission tout au long des siècles. Lorsque nos ancêtres ont pleuré lors de cette nuit du Neuf Av, nos Sages ont déclaré que ces pleurs étaient injurieux et ont dit : « Vous avez pleuré en vain ! Eh bien, vous pleurerez un jour tout au long des générations ! » (Taanit, 29 a). Et D’… sait ô combien de larmes avons-nous dû verser durant deux mille ans d’un exil dramatique.
Ces propos confirment donc la légèreté de l’intérêt que portent certaines communautés membres du peuple juif pour la Terre d’Israël, laissant même parfois déceler une incompréhension profonde de la vitalité du lien qui unit le peuple d’Israël à sa terre. Or ce rapport conflictuel et ambivalent prend sa source bien avant l’anecdote contée par Rabbi Yéhouda Halévy dans le Kouzari où il cite le fameux précédent d’Ezra et de Néhémie, intervenu après la destruction du Premier Temple: déjà en ces temps, ces deux leaders incontestés de la diaspora de Babylone avaient appelé le peuple juif au retour en Eretz Israël : or seule une infime partie des exilés avait répondu favorablement à cet appel.
Le Or Ha’haïm akadosh (rabbi Haim Ben Attar) écrit que les dirigeants-justes d’Israël à travers les générations seront tenus pour responsables de la permanence de l’exil, car ils auraient dû inciter les enfants d’Israël à aimer Eretz Israël. (Vayiqra 25 :25)
Nous ne sommes pas des extra-terrestre, Dieu soit loué, nous nous fions à nos maitres qui tout au long des siècles ont fixé « les signes évidents du début de la fin ». Il faut avoir des oreilles et des yeux pour discerner ce qui s’est passé pendant ces 100 dernières années. Le prophète Isaïe interpelle:
« Sourds, écoutez; aveugles, ouvrez les yeux et voyez ! Qui est aveugle, sinon mon serviteur, sourd sinon le messager que j’envoie. Qui est aveugle comme le favori du Seigneur, aveugle comme le serviteur de l’Eternel ? » (Isaie 42, 18 et 19)
Les « Talmidé Hakhamim » (les justes) ainsi que nos dirigeants qui sont appelés ici serviteurs et messagers de l’Eternel sont sourds et aveugles! Quel drame douloureux! Eux qui devaient être les anges du « Service », les envoyés de Dieu sont devenus mal entendant et non voyant. Or il y a tellement de choses à voir et à entendre aujourd’hui, que seuls ceux qui en seront capables prépareront le peuple vers ces lendemains tant espérés, tant souhaités.
Quand les gens ne savent plus où est le vrai et où est le faux, ils finissent par seulement chercher le rassurant et sur ce registre, il est facile de donner le change.