En tant qu’électeur relativement libre, j’ai l’intention de voter.
Je mettrais dans l’urne un bulletin blanc.
Le désenchantement politique n’est pas de l’indifférence citoyenne et mon vote blanc exprime une détermination constante à m’investir dans le processus démocratique.
L’école nous enseigna que la démocratie devait révéler le gouvernement du peuple par, et pour, le peuple, un séduisant aphorisme, aux relents tranchants. Nous l’acceptions sans émettre aucun doute et, parvenus à l’âge adulte, nous pensions détenir collectivement les clés du pouvoir.
L’illusion de celles-ci pouvait paraitre édifiante malgré une totale impuissance, en vérité, à agir sur notre présent et, qui plus est, sur notre devenir. Rares sont-ils ces lieux et ces moments où l’on se questionne, où l’on s’interroge à propos des formes actuelles de la démocratie représentative: offrira-t-elle réellement les moyens, les moins dommageables possible, d’une gouvernance populaire de l’état, du peuple et de la nation?
Qui aide qui?
Qui est le domestique, qui est le seigneur?
Vous sentez-vous très influent?
Votre gouvernement est-il représentatif ?
Telles que nous les pratiquons, ne trouvez-vous pas nos démocraties infirmes et hésitantes, nos gouvernements semblent pourtant vouloir les exporter partout ailleurs.
Certes, cela vaut mieux que des autocraties et des théocraties oppressantes, pourrait-on dire, mais sans être d’un relativisme moral, est-ce vraiment suffisant?
Convenons du fait qu’elle reste le moyen le plus constitutionnel pour conduire un pouvoir et sa politique, d’aucun ne viendrait remettre en cause sa légitimité. Le bémol de la démocratie libérale demeure son incapacité à l’introspection, persuadée de son bon droit moral elle annihile toute dissidence, hors de sa propre sphère, au sein du débat publique. Si l’individu choisit de s’abstenir ou de voter blanc, il est automatiquement accusé d’avoir commis une faute sans appel, un péché contre l’autorité établie des principes du suffrage universel et donc banni du discours politique.
Si vous désirez protester contre le système en place, il vous faudra argumenter, vous devrez mériter le droit de le faire dans le cadre démocratique. Constituer, rallier ou appuyer un parti, se soumettre ou élire aux élections, triompher, puis, avec le mandat, réaliser les réformes.
En vous abstenant, ou en gaspillant vos votes, vous gâchez une occasion: vous êtes donc capricieux, hasardeux ou candide.
Avec nous ou contre nous, autre aphorisme séduisant mais non moins péremptoire.
La démocratie totalitaire n’est donc en aucun cas un oxymore.
Avec des élections législatives à venir, et des disparités politiques et doctrinales devenues imperceptibles, j’ai beaucoup de mal à discerner la personne, le parti, à même d’approcher un tant soit peu ma philosophie socio-économique et nationale. Le plus souvent, chaque mouvement figure deux principes, ou plus, que nous estimons fondamentalement incompatibles: nationalisme capitaliste ou socialisme néo-libéral.
Déjà vu à Gaza, tout retrait au nom d’une accalmie relative n’est pas exactement le bienvenu, la paix à tout prix peut être contre-productive. Persister à vouloir maintenir cette mainmise partielle, et dégradante, sur les territoires, refuser aux habitants israéliens des routes adéquates, une urbanisation honorable et un développement engagé et militant.
Dans ces conditions aussi absurdes que non productives, ceux d’entre nous qui veulent, malgré tout, s’engager dans le processus démocratique, n’ont bien sûr pas le droit de dire: nous n’aimons aucun des partis, et, à moins d’une renaissance politique, nul n’est le bienvenu.
En Occident, les sondages montrent le sens et l’entendement des abstentions et des votes blancs. Plus de 30% des électeurs iraient voter si le vote n’avait aucun parti pris, peut-être devrions nous alors former un mouvement intitulé: ‘Aucun candidat ne mérite ma voix’. Ce qui pose bien évidemment la question de savoir s’il est judicieux d’accorder les malingres taux de participation simplement à l’indolence des votants. Le désenchantement, après tout, n’est pas la même chose que l’indifférence.
Là où la corruption et la lassitude infectent le corpus politique, que la soif de pouvoir pour le pouvoir à long terme légitime les politiciens, les causes deviennent fécondes à la fois pour les racines d’un sectarisme généralisé et pour la naissance d’une révolution.
Faudra-t-il peut être choisir cette dernière option?
Imaginons une ville cosmopolite où les habitants sont désemparés face au manque de volonté politique à s’engager au dialogue, à l’écoute, au débat, vis-à-vis du peuple.
Ainsi, sans savoir trop qui, ni trop comment mais de façon mystérieuse, les citoyens décident collectivement de déclencher une révolution silencieuse qui obligera les politiciens à prendre acte des votes blancs. Pas une fois…. mais à chaque élection!
Certes, ces derniers sont naturellement estimés comme nuls et non avenus, ils sont donc couramment mis au rebus dans le choix de la majorité. Et disons-le, c’est la majorité qui compte!
Mais que se passerait-il si une majorité de la population, avec un taux de participation exceptionnellement élevé, décidait de voter blanc?
Comment les politiciens et le monde démocratique pourraient-ils l’ignorer?
Il serait aisé, et inexact, d’estimer cela comme une simple fiction politique.
Au demeurant, cela ne s’est jamais produit dans l’Histoire de la démocratie mondiale mais, au fait, ne serait-ce pas notre meilleur argument pour corriger la démocratie de ces exigences figées qu’elle nous impose?
En clair, si les votes blancs obtiennent une majorité suffisante, ils empêcheront toute représentation démesurée d’un parti. Aussi dépitée que puisse être la population, les bulletins blancs, par opposition à une abstention absolue, racontent une détermination assidue, bien que dubitative, de s’inviter au sein du mouvement démocratique dans ses propres termes. Cela forcerait, espérons-le, les politiciens à s’extirper de l’indifférence apparente qui détermine leurs faits et gestes dans l’administration de l’état. Traiter de questions relatives aux difficultés locales, régionales et nationales, concernant la justice sociale et économique, mais aussi écologique. Mener une politique extérieure qui réponde aux grandes questions internationales telles le terrorisme, la guerre en terre étrangère, entre autres. Tout cela devrait enfin permettre au peuple d’examiner, en outre, les fondements précaires de la démocratie représentative et de repenser la volonté rousseauiste de conclure un contrat social, souvent contestable car souvent injuste, avec le faible, l’indigent et l’assisté.
Essentiellement, bien sûr, ce serait là le seul moyen de vérifier si c’est bien le « démos » (peuple) qui est au cœur de la démocratie et possède réellement le « cratos » (pouvoir).
Le régime actuel est-il celui que nous connaissons, celui présent pratiquement au sein de tout l’Occident, apparemment démocratique?
Serait-il ce même pouvoir mais avec un tout autre sens, à ce jour inaccompli?
Dites-le, posez la question : sommes-nous réellement en démocratie?
Que répliquez-vous?
On nous rabâche au quotidien, et ce depuis notre tendre enfance, que nous respirons la démocratie. Il est, d’ailleurs, fort possible que ce matraquage, à longueur de journée, soit instauré pour nous amener gentiment à partager cette croyance idyllique. La complexité essentielle dans cette problématique demeure la propension vraie de la représentation politique, d’aucun affirme que nous vivons dans une démocratie représentative. Celle-ci est généralement mise en opposition avec la démocratie directe où les citoyens prendraient une part active à la législation publique.
A mon humble avis, il me parait évident d’affirmer, tout naturellement, que la démocratie doit être directe, sinon ce n’est simplement plus le peuple qui gère. « Démocratie directe » serait donc une redondance. Si cela n’est guère son fondement structurel, il nous faudra assurément tirer les sonnettes d’alarme et prévenir des dérives auxquelles nous conduisent toutes les formes de représentation dissidente. Chacun de nous peut constater comment les « affaires » sont menées, les prétendus légats du peuple cessent souvent de servir ce dernier, ils ne représentent qu’eux-mêmes, les intérêts de leur classe ou les intérêts du grand capital.
Alors, crachons le morceau et cessons cette mascarade de soi-disant démocratie et crions la vérité : les grands échansons et les grands panetiers, la bourgeoisie imbue, tous veulent nous faire croire que nous évoluons au sein d’un libéralisme bénéfique à tous.
Eh bien non mes chers compatriotes, nous vivons au sein d’une oligarchie, ou si vous préférez, au sein d’une ploutocratie.
Le reste est entre vos mains et votre esprit réfléchi, il ne sera jamais plus une simple littérature!