En 1831, l’artiste allemand Friedrich August Moritz Retsch peint un tableau considéré comme tragique pendant plusieurs décennies, jusqu’à ce qu’un événement surprenant se produise, changeant ainsi son destin.
On l’appelle « Les joueurs d’échecs ».
On pourrait aussi l’appeler « Le diable joue aux échecs avec un homme pour son âme ».
L’échiquier du tableau est posé sur une table en marbre rappelant un cercueil, ceci souligne qu’il s’agit d’un jeu de destin – la vie et la mort pour l’homme.
Le diable, assis à gauche, est vêtu de couleurs qui symbolisent l’intrigue, la ruse et joue avec les outils noirs.
Le lion, à côté de lui, tient un crâne (signe de mort).
Le « roi » du jeu est la figure du diable lui-même, la « reine », femme séduisante, représente les passions et les convoitises, et les six autres vases sont les six vices : la paresse, la colère, l’orgueil, la tromperie, l’avidité et incrédulité.
À droite, un jeune homme est assis. Près de lui se trouve un ange qui désigne la bonté. Le « roi » du gars incarne son âme, » «la Reine» » sa foi. Les autres vases symbolisent les vertus d’espoir, de paix, d’amour, d’innocence, d’humilité et de vérité.
En apparence, il semble que Satan ait déjà gagné la partie.
On dit que dans le passé, on appelait ce tableau « échecs » : le diable tient plus de pièces blanches dans sa main et possède un net avantage dans le jeu. Son regard arrogant observe les visages inquiets de l’acteur et de l’ange et, sur fond de crânes, de cercueil, d’araignée au premier plan du tableau, il semble que l’avenir du jeune homme soit déjà scellé.
« L’artiste dépeint Satan comme fort et tolérant, il connaît nos faiblesses, les humains, à l’intérieur comme à l’extérieur. Quelle est sa stratégie ?
Quelles sont ses tactiques ? », pourrait-on demander en analysant le tableau comme une métaphore de la vie réelle.
Première tactique possible : pousser le joueur dans des situations où il déteste se trouver pour exposer ses points faibles – une démarche que les joueurs d’échecs professionnels connaissent bien.
Une autre tactique du diable consiste à penser avec autant d’avance que possible, comme le meilleur joueur d’échecs. « Le diable est patient, il nous surprend par étapes », explique-t-il.
Nous le savons dans la vraie vie, lorsque, par exemple, nous essayons d’éviter une tentation et lentement, progressivement, elle réapparaît.
Une autre tactique : nous amener à prendre des décisions basées sur les émotions. Les joueurs d’échecs sont conscients de l’influence des émotions sur leur jugement, tout comme le diable. Cela repose sur le fait que nous nous disons « si ça fait du bien, fais-le ».
Mais « nous savons tous que ce qui fait du bien, à ce moment-là, peut revenir nous mordre plus tard ».
Et cette tactique bien connue : brouiller les frontières entre le bien et le mal, nous faisant ainsi emprunter un chemin que nous ne devrions pas emprunter.
Dans la vie comme dans le jeu, le diable peut agir ainsi en mettant en doute notre capacité à distinguer le bien du mal, ce qui rendra le bon chemin sûrement plus obscurci.
Cependant, environ 70 ans après que Retsch ait brossé le tableau, il est devenu clair que l’avantage de Satan dans le jeu n’était qu’une illusion.
Selon un article publié en 1898 dans un magazine d’échecs, on pouvait lire que Paul Murphy, l’un des plus grands joueurs d’échecs de tous les temps, venu visiter la maison d’un ami, a remarqué cette peinture de Retsch. Selon l’histoire, Murphy s’est approché du tableau, l’a étudié pendant quelques minutes, puis a dit à son ami : « Je peux gagner la partie pour ce jeune homme, sors ton échiquier et je te le montrerai. »
Les deux ont joué et Murphy a vaincu le diable.
En une seconde, tout le sens du tableau a changé ! Même si l’homme pense que tout est perdu et voit le diable déjà en train de célébrer, on voit, en fait, que Dieu (représenté dans la figure angélique) a laissé à l’homme une sortie. Il peut en profiter s’il joue correctement avec les « outils » reçus – le « roi » (l’âme), la « reine » (la foi) et les vertus : l’espérance, la paix, l’amour, l’innocence, l’humilité et la vérité.
À ce sujet, comment ne pas penser à ces 2 œuvres littéraires: la Peste et l’Étranger d’Albert Camus ? Mon but est de décrire l’idée camusienne de l’absurde au vu et su de la peinture de Retsch .
Selon l’écrivain, la vie humaine est absurde, dénuée de sens, irrationnelle et illogique. On peut donc dire que son point de vue, au premier abord, est pessimiste et désespéré. Mais un rapide coup d’œil à ses pensées montre que le voyage qui commence dans le désespoir n’a pas besoin de se terminer dans le désespoir. La vie qui se termine par la mort n’a aucun sens, mais au milieu de la beauté de cette vie, la douleur et le désespoir qui y sont inhérents ne doivent pas être ignorés. Maintenant que nous vivons dans ce monde absurde, dénué de sens, irrationnel et illogique, nous devons créer nous-mêmes le bonheur. Le bonheur, c’est aimer l’Humanité et le Monde sans rien en attendre. Camus dit : « Là où il n’y a pas d’espoir, il nous appartient de l’inventer ». Le personnage de Meursault dans L’Étranger ne pense pas de la même manière que la plupart des gens de la société. La distance entre ce jeune personnage et les autres est clairement tracée. Il regarde froidement tous les événements de sa vie, y compris la mort de sa mère. Il accepte la mort, insensible. La vie n’a aucun sens pour lui. Dans le roman, on assiste à la fois à sa force et au conflit qui surgit entre Meursault et la société.
La Peste raconte la lutte d’un homme contre une épidémie de peste qui sème le désespoir dans une ville entière. Le personnage principal, le Dr Rieux, et ses amis se battent contre cela et réussissent. Pourtant, le médecin sait ce succès temporaire, la peste reviendra. En même temps, il est conscient de la nécessité de lutter contre le mal aussi longtemps que nous vivons.
En bref, on peut dire que « l’espoir » joue un rôle important dans le monde de Camus.