MA PEINE JOYEUSE par Rony Akrich

by Rony Akrich
MA PEINE JOYEUSE par Rony Akrich

Transporté par la libération des otages du Hamas, je sens en moi une émotion que les mots ont peine à contenir.

Un sourire monte, irrépressible, devant ces visages rendus à la lumière. Un sourire qui veut croire, qui veut respirer, qui murmure : la vie n’a pas été totalement vaincue.

Mais dans le même instant, un autre œil se voile, l’œil de la mémoire et de la loyauté.

Cet œil-là pleure. Il pleure le devenir incertain livrés à la barbarie. Il pleure nos soldats tombés au champ d’honneur, ces jeunes vies données pour que le pays tienne encore debout.

Il pleure aussi notre peuple assassiné le 7 octobre 2023, cet abîme de feu et de sang où le monde s’est démasqué, révélant une hypocrisie insoutenable : se dire humaniste tout en fermant les yeux sur des Juifs massacrés.

Ainsi va notre peuple : avec un œil qui rit parce qu’il choisit la vie, et un œil qui saigne parce qu’il refuse d’oublier.

Nous savons nous réjouir, mais jamais au prix de la mémoire. Nous savons aimer la vie, mais sans trahir nos morts. C’est cela, être vivant en Israël : porter dans la même poitrine une joie qui tremble et une douleur qui veille.

Et j’ose espérer, non, j’exige, que l’État comme le peuple tireront les leçons de cette tragédie immense.

Car le 7 octobre n’est pas un accident de l’Histoire : c’est un avertissement, une convocation à la lucidité. Toutes les illusions se sont effondrées : les accords vides, les discours pacifistes déconnectés du réel, les calculs politiciens bâtis sur l’oubli des dangers, cette dangereuse habitude de préférer le confort à la vérité.

Nous n’avons pas seulement été attaqués. Nous avons été réveillés.

Et si cette douleur ne nous transforme pas, alors elle aura été trahie.

Que le retour des otages ne soit pas un anesthésiant, mais un jugement.

Un jugement sur notre capacité à redevenir un peuple debout, un État conscient, responsable, libre de ses illusions et fidèle à ses morts.

Ce n’est pas seulement une question de stratégie. C’est une question de fidélité.

Fidélité à ceux qui ne reviendront pas, fidélité à ceux qui reviennent. Fidélité à cette vocation biblique qui fait de nous un peuple pour qui la vie n’abolit pas la mémoire, elle la prolonge.

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