Bien que Vashti et Esther ne se soient jamais rencontrées, leur relation fait partie intégrante de la compréhension des événements du Livre d’Esther.
Vashti disparaît à la fin du premier chapitre, mais elle jette une ombre sur le reste du livre
Lorsque nous la rencontrons dans le premier chapitre, nous apprenons à son sujet qu’elle est belle mais entêtée. Elle organise un banquet. Elle refuse de voir ses apparitions devant le roi uniquement régies par ses désirs. Pour cette dernière profanation, Vashti paiera cher, elle perdra sa couronne et sera à jamais bannie du statut de reine.
À la fin du premier chapitre, il est clair qu’une femme à la cour d’Assuérus se doit d’être respectueuse et de se présenter au roi selon son bon vouloir. L’essentialité de l’obéissance féminine est confirmée par le dernier verset du chapitre dans lequel une missive est envoyée à tous les sujets d’Assuérus leur rappelant, sans équivoque, que «tout homme doit régner dans sa maison»
En revanche, Esther est d’abord présentée comme l’image parfaite et contraire de Vashti. Cette dernière était opiniâtre et indépendante, Esther est passive et soumise. L’usage réflexif du mot hébreu «Lakah’» lui est constamment appliqué. Elle est «prise» par Mordechai comme fille adoptive, «prise» au harem du roi et «prise» devant le roi. Elle ne révèle pas son identité au palais, « car Mordechai lui avait ordonné de ne pas le dire ». Elle ne demande rien au harem, n’acceptant que ce que Hagai, l’eunuque du roi, choisit de lui donner.
Après avoir été couronnée reine, on nous dit même qu’Esther continue d’obéir aux commandements de Mordechai comme elle l’avait fait sous son hospice. Il n’est guère surprenant qu’Assuérus aime Esther. Elle est le modèle de la docilité, l’antidote avérée de dame Vashti.
D’ailleurs, elle comprend très bien son rôle de reine auprès d’Assuérus. Lorsque son mentor lui ordonne de comparaître devant le roi et d’intercéder en faveur des Juifs : Il est connu de tous que l’on ne peut comparaitre devant le roi sans être convoqués, on risque la mort, répond Esther. Elle connaissait le sort réservé à la précédente élue, pour ne pas avoir obéi. Mordechai insiste auprès d’Elle sur le fait qu’il lui incombe de plaider la cause de sa nation
C’est un moment de crise pour Esther. Elle est prise entre des obédiences conflictuelles, envers son père adoptif et son mari.
De plus, se présenter devant le roi sans invitation est un sacrifice face au rôle d’héritière.
Elle a été choisie pour être reine car elle incarnait le changement. La position d’Esther, son identité et très probablement sa vie sont toutes étroitement liées à son obéissance à son roi.
Dans ce moment du destin, Elle se regarde dans son miroir et découvre qu’elle n’est pas si différente de Vashti après tout. Elle décide de prendre les choses en main et de résister aux sources de l’autorité. Esther prend le contrôle du plan de Mordechai, changeant et modifiant, comme bon lui semble, les modalités. Comme l’autre, elle n’apparaîtra devant le roi qu’après avoir décidé que le moment était venu, après trois jours de jeûne. Au lieu de suivre la suggestion de Mordechai et de simplement présenter sa requête, elle organisera un banquet comme l’a fait Vashti. Pour réussir, Esther comprend et adopte certains aspects de l’ancienne reine répudiée.
Certes, nous ne savons pas vraiment pourquoi Vashti a refusé de comparaître devant le roi. Cela aurait pu être par modestie, elle aurait pu tout simplement être mécontente de son apparence, ce jour-là.
Peut-être était-elle trop capricieuse ?
Peut-être était-elle une proto-féministe luttant pour un sentiment de plénitude et d’indépendance ? En tout état de cause, sa désobéissance met un terme brutal à sa carrière, et son destin est délibérément voué à servir de leçon de chose aux femmes du monde entier
Esther s’arme de courage pour sauver son peuple. Tout en passant en revue les pratiques de ‘la déchue’, elle en tire des leçons effectives.
Esther est plus réfléchie, plus subtile, (plus Divinement inspirée) et finalement beaucoup plus accomplie que celle-ci. Pourtant, pour triompher, il lui faudra adopter un certain nombre d’arts et de manières, attributs de la personnalité de Vashti.
Soutien invétéré des féministes orthodoxes, je suis constamment confronté à des images taboues de femmes dangereuses dont on nous dit de nous éloigner.
A est trop radicale, B est allée trop loin, C s’est fait trop d’ennemis. Elles luttent pour délimiter leurs frontières, pour être ouvertes au monde, et pourtant, rester traditionnelles, libres, et pourtant, régies par la Loi d’Israël.
Pourim est ce jour de fête au cours duquel nous explorons et défions nos limites. Nous nous déguisons en d’autres personnes, nous mettons un masque, certains d’entre nous boivent au point où les différences deviennent floues.
Dans l’esprit de nos propos, et à la suite de l’héritage de notre reine Esther, je nous encourage à reconsidérer qui feignons-nous d’être et qui fuyons-nous.
Comme Esther l’a fait, nous pouvons découvrir que nous ne sommes pas si différents de ceux que nous craignons et les leçons les plus importantes peuvent être tirées des enseignants les moins ‘convenables’.
On dit de quelqu’un qu’il est « ouvert d’esprit « lorsqu’il est à l’écoute des opinions de chacun et ne cherche pas à imposer ses propres idées, quand il est enclin à se laisser convaincre et n’est pas fermement assis sur des principes inébranlables.
L’ouverture d’esprit s’oppose ainsi au dogmatisme, c’est une attitude qui émerge sur le fond de la versatilité du monde. Etre « ouvert d’esprit « est considéré comme une qualité, à laquelle s’annexent la tolérance, le respect, la curiosité, l’humanisme et la modernité. Cependant, « l’ouverture d’esprit » peut aussi être critiquée pour son caractère parfois déraisonné entraînant au relativisme ou à l’excentricité. En outre, si l’on tolère tout, nous sommes alors portés à la contradiction, en étant forcés d’accepter à la fois une opinion et son contraire. Il s’agit alors de donner un autre sens au terme « accepter », qui rendrait à l’ouverture d’esprit sa légitimité et sa raison d’être.