De la violence verbale à la violence physique en politique – Par Rony Akrich

by Rony Akrich
De la violence verbale à la violence physique en politique – Par Rony Akrich

L’intolérance des différentes opinions et croyances politiques devient de plus en plus grave et dangereuse et fait craindre que le tissu social, en chemin vers une lente désintégration, parvienne, peu ou prou, vers une probable escalade de la violence. Une opinion politique différente de la mienne ne fait pas de l’autre mon ennemi. Soyons tolérants et justes! Il n’y a pas des anges d’un côté et des démons de l’autre, nous sommes tous les enfants d’Israël pour le meilleur et pour le pireS

La tolérance politique signifie accepter et respecter les droits fondamentaux et les libertés civiles des individus et des groupes dont les opinions diffèrent des nôtres. Tous les citoyens, y compris les dirigeants politiques, ont la responsabilité de faire preuve de tolérance politique dans leurs propos et leurs actions. Il nous faut refuser et condamner très clairement toute déclaration ou affirmation que ‘seule la force amène la victoire’, il ne peut rien avoir de tel dans nos contrées. La tolérance politique est un principe essentiel et cardinal de notre démocratie israélienne. En tant qu’idéal, elle le revendique dans sa législation, tous les citoyens du pays doivent se considérer, les uns et les autres, avec respect et bénéficier de l’égalité et de la fraternité de traitement entre tous. Le fondement de la démocratie libérale est l’acceptation et l’appréciation de l’autre que moi.

La vie démocratique autorise les désaccords de tout ordre comme les différences religieuses, les divergences politiques ou les orientations singulières des individus au sein de de la société civile.
La démocratie clame haut et fort la valeur du pluralisme et la vertu de la conversation comme moyen de résoudre les conflits.
L’intolérance politique née de ce désir de restreindre la pensée et le mouvement des personnes ou des groupes que l’on hait car pensant autrement, agissant différemment.

Cela constitue une réelle menace pour le devenir de la démocratie car cela discrimine et annihile la libre parole, empêche certaines franges de la population à pouvoir être entendues et représentées.
L’intolérance génère une culture conformiste et une société fermée a ses quatre coudées, cela réduit l’entendement et la possible analyse des citoyens israéliens vis à vis du tissu socio-politique complexe et façonne leur comportement futur.
On le répète à maintes reprises: la polarisation démantèle le corps de notre société démocratique, elle menace notre existence en continue en tant que société saine et unie.

Le consensus relatif, qui existait parmi les anciens partis au pouvoir autour de certains principes de base et la possibilité d’un changement de gouvernement sans drame, se désintègre complètement.
Ces métastases de la rancœur et de la haine ont commencé à se propager depuis l’assassinat de feu le Premier ministre Yitzhak Rabin et la tumeur grossit inexorablement

Même les compromis, si nécessaires pour mettre en œuvre des décisions aussi minimalistes que possible, sont difficiles et ne trouve guère de moyen pour résoudre ces équations à tant d’inconnues.
Le dialogue démocratique cède la place à la violence verbale, on n’écoute point son prochain, on élève le ton, on crie fort, on persiste à intensifier l’impudence et la bêtise humaine.
Peu importe s’ils appartiennent à la gauche ou à la droite de la carte politique, ces énergumènes présentent de troublantes similitudes.

Je ressens chez eux, et peut-être que je me trompe, une certaine détresse due à un sentiment d’incertitude.
Les partisans des doctrines radicales souffrent généralement d’une perte de sens, souvent à la suite d’événements perçus comme injustes à leurs yeux.
Lorsque l’environnement semble incompréhensible, cela entraîne, chez les personnes fragiles, un besoin naturel de redéfinir les orientations de l’existence, de se rattacher à ses évidences. Ils compensent leur insécurité par une conviction idéologique audacieuse et extrême.

La détresse personnelle, ressentie face à l’inconnu, exacerbe le même besoin existentiel de découvrir et de décider par soi-même. Les croyances extrêmes procurent donc, face à un environnement perçu comme complexe et menaçant, une apparence accessible de sens.
Que ce soit à droite ou à gauche, les deux extrêmes pensent que les solutions aux crises sont simples.
Cette croyance les rend très vulnérables aux théories du complot, mais de cette manière, ils peuvent, tout du moins, attribuer tous les maux de la terre à une cause unique et identifiable.
Ce n’est rien d’autre qu’un excès de confiance religieuse, politique, à la limite de l’arrogance.
Ceint de certitude, persuadés de leur juste voie et de leur droit inconditionnel, les adeptes du radicalisme politique bombent le torse emplis d’un sentiment de supériorité, certaine.
Ils ont tendance à juger leurs croyances comme des vérités inaliénables, elles concernent tous les citoyens et méritent donc d’être reconnues par la majorité.

Pour eux, la chose est claire et nette, elle va de soi, tout comme le langage dans lequel ils sont habitués à formuler leur récit.
Ainsi s’habituent-ils aux déviations systématiques et intentionnelles de la pensée logique. Ils n’entendent que les arguments censés s’inscrire dans le réseau interprétatif fourni par l’organisation militante et nient tous les faits qui pourraient les contredire.
L’extrémisme est intellectuellement arrogant, même si ses affirmations sont pauvres et ses connaissances limitées.
Enfin, cette simplicité cognitive attachée à l’excès de confiance en la doctrine et le groupe, ensemble, conduit à l’intolérance dans laquelle les extrémistes de tous bords politiques sont reconnaissables.
De toutes parts, ils aident à polariser la société, ils appréhendent la politique comme un jeu où il ne peut y avoir que des gagnants (eux) et des perdants (les autres). Ils pensent tout compromis impossible. Lorsqu’ils arrivent au pouvoir, ils ne peuvent pas honorer les restrictions qui leur sont imposées par les institutions libérales, telles que l’indépendance du pouvoir judiciaire ou le contrôle constitutionnel.

En conséquence de l’augmentation du nombre d’activistes et de sympathisants qui s’identifient à ces idéologies, les partis modérés, de droite et de gauche, souffrent régulièrement d’érosion aux élections.
Le paradoxe reste que le profil psychologique des extrémistes de droite comme de gauche, des deux côtés, demeure similaire, alors qu’ils prétendent défendre généralement des idées contradictoires. Il arrive même que dans certaines circonstances historiques, les idéologies extrêmes de droite et de gauche réussissent, parfois, à conjuguer leurs enjeux et à mêler leurs idéaux militants. Ce n’est qu’alors qu’ils devinrent extrêmement dangereux, ce fut ainsi, on s’en souvient, que deux idéologies extrêmes du XXe siècle: le national-socialisme et le communisme meurtrier se sont ralliés, le temps de mettre à feu et à sang l’Europe…
« Note sur la suppression générale des partis politiques » (Écrits de Londres)
Simone Weil (1909-1943) Philosophe française

« Même dans les écoles on ne sait plus stimuler autrement la pensée des enfants qu’en les invitant à prendre parti pour ou contre. On leur cite une phrase de grand auteur et on leur dit : « Etes-vous d’accord ou non ? Développez vos arguments. » À l’examen les malheureux, devant avoir fini leur dissertation au bout de trois heures, ne peuvent passer plus de cinq minutes à se demander s’ils sont d’accord. Et il serait si facile de leur dire : « Méditez ce texte et exprimez les réflexions qui vous viennent à l’esprit ».
Presque partout – et même souvent pour des problèmes purement techniques, l’opération de prendre parti, de prendre position pour ou contre, s’est substituée à l’obligation de la pensée. C’est là une lèpre qui a pris origine dans les milieux politiques, et s’est étendue, à travers tout le pays, presque à la totalité de la pensée. Il est douteux qu’on puisse remédier à cette lèpre, qui nous tue, sans commencer par la suppression des partis politiques. »

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