La capitulation n’est pas la compassion, Le Hamas doit tomber – par Rony Akrich

by Rony Akrich
La capitulation n’est pas la compassion, Le Hamas doit tomber – par Rony Akrich

Ce texte ne s’adresse pas à ceux qui cèdent à la seule force de l’émotion, compréhensible, certes, mais aveuglante dans une situation de guerre. Il s’adresse à ceux qui sont prêts à réfléchir, à mesurer les conséquences, à exercer la raison plutôt que de se laisser guider uniquement par le cœur. La compassion est nécessaire, mais sans la raison elle devient déraison; l’émotion est légitime, mais sans l’intelligence politique elle mène à la catastrophe. Notre responsabilité collective est de hisser la douleur à la hauteur de la lucidité.

Le peuple d’Israël se trouve à la croisée des chemins. Le mot « accord » revient sans cesse dans le discours public, comme une formule magique censée ramener la vie à la normale: accord pour libérer les otages, accord pour mettre fin aux souffrances, accord pour rétablir une routine. Mais derrière ce mot apaisant se cache une autre réalité, bien plus grave: un tel accord, s’il laisse le Hamas en place en tant que dirigeant de la bande de Gaza, n’est pas une libération mais une capitulation enveloppée d’un papier brillant. Ce n’est pas de la compassion mais une fracture stratégique, ce n’est pas un salut mais l’engagement dans une servitude future, ce n’est pas la paix mais une trêve destinée à préparer la guerre suivante. Soyons clairs: la question n’est pas de savoir si nous voulons le retour des otages. Chaque Israélien porte en lui cette douleur. Les familles sont déchirées, des vies ont été suspendues, des cœurs ont été arrachés avec leurs fils et leurs filles. Le désir de les voir revenir vivants existe dans chaque foyer. Mais le défi existentiel est de distinguer entre la compassion humaine naturelle et l’effondrement de la responsabilité nationale. Celui qui exige « un accord à tout prix » dit en réalité: l’avenir de tout un État, la sécurité d’une nation entière, est subordonné à la vie de quelques dizaines de personnes. Celui qui accepte que le Hamas survive après tout ce qu’il a commis dit en réalité: donnons une prime à l’ennemi pour son crime même, consentons à la poursuite du chantage, et diffusons un message de faiblesse morale et existentielle. Un accord qui restituerait les otages mais laisserait le Hamas debout créerait une immense conscience de victoire dans le camp palestinien. Le Hamas, malgré ses pertes humaines et la destruction de ses quartiers, pourrait proclamer : « Nous avons survécu, nous avons plié Israël, nous avons ramené nos frères ». Aux yeux de la société palestinienne, la simple survie de sa direction après le massacre du 7 octobre serait une victoire historique. Déjà Thucydide l’avait écrit dans la guerre du Péloponnèse : « Les puissants font ce qu’ils peuvent, les faibles subissent ce qu’ils doivent ». Si Israël apparaît faible, le message ne sera pas celui de la compassion mais celui de la vulnérabilité. Comme le souligne Machiavel dans Le Prince, l’État ne peut se gouverner par une pitié immédiate mais doit envisager les conséquences pour sa survie. Le signal se répandra aussi dans la région et dans le monde: Israël peut être soumis au chantage. L’enlèvement d’otages deviendra un instrument stratégique. Pas seulement pour le Hamas, mais aussi pour le Hezbollah, les milices chiites en Irak et au Yémen, et même pour des États ennemis comme l’Iran. Or, comme le rappelait Max Weber, l’État détient le monopole légitime de la violence, s’il cède ce monopole à une organisation terroriste non étatique, il cesse d’être un État souverain. L’expérience le prouve: chaque cessez-le-feu qui n’a pas été utilisé pour détruire les capacités du Hamas lui a servi de tremplin pour se reconstruire. Après « Plomb durci », après « Bordure protectrice », après « « Gardien des murailles », chaque trêve a permis au Hamas de rebâtir ses tunnels, de produire plus de roquettes, de réorganiser ses forces. Clausewitz enseignait que « la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens ». Si la politique du Hamas est la destruction d’Israël, toute pause non décisive lui sert de continuité. Michel Foucault a montré que les institutions de pouvoir ne disparaissent jamais: elles se reconfigurent. Ainsi le Hamas, après chaque épreuve, reconstitue sa police, ses systèmes d’éducation et de taxation, pour maintenir son contrôle par la terreur. Un accord qui laisserait le Hamas en place serait lui tendre une corde de survie. Jean Baudrillard dirait : le terrorisme fonctionne par « simulacres », la simple survie devient une victoire symbolique. Si Israël accepte ce jeu, il devient complice de cette illusion. Les conséquences d’un tel accord ne se limitent pas à Gaza. En Judée-Samarie, les forces extrémistes seraient galvanisées. Si le Hamas survit et justifie le massacre du 7 octobre, alors dans les camps de réfugiés de Naplouse ou Jénine, beaucoup chercheront à imiter ce modèle. Bernard Lewis a souvent expliqué que dans le monde islamique, la survie d’un mouvement islamiste radical est perçue comme la preuve de sa légitimité. Et Samuel Huntington, dans Le Choc des civilisations, a montré que les conflits identitaires ne se règlent pas par des arrangements tactiques mais par la victoire d’un récit sur un autre. La survie du Hamas renforcerait le récit d’une « civilisation islamique combattante » face à Israël et à l’Occident. Quant à l’Iran, le message serait limpide: son investissement dans les milices régionales porte ses fruits. Le Hamas, sa créature, non seulement n’a pas été défait, mais a reçu une légitimité internationale renouvelée. C’est la porte ouverte à un Hezbollah encore plus hardi, à un Jihad islamique renforcé, et à la diffusion du « modèle des enlèvements » sur toutes les frontières d’Israël. Certains diront : mais que faire des otages? Peut-on les abandonner? La vérité est dure mais incontournable: sacrifier l’avenir de centaines d’Israéliens qui mourront dans les guerres à venir n’est pas moralement supérieur à l’incertitude douloureuse d’aujourd’hui. La vraie compassion ne se mesure pas à l’instant, mais à la perspective des générations. Emmanuel Kant, dans Vers la paix perpétuelle, écrit que la paix véritable n’est pas une trêve mais la disparition de la capacité de l’ennemi à poursuivre la guerre. Une compassion qui n’aboutit pas à cette paix n’est qu’un mensonge moral. Albert Camus, dans L’Homme révolté, rappelle que le vrai révolté refuse de céder au meurtre absurde: céder au terrorisme au nom d’une compassion factice, c’est trahir la justice. Hannah Arendt, dans Les Origines du totalitarisme, montre que céder au terrorisme, c’est lui donner une justification morale et détruire les bases mêmes d’une société libre. Dans la tradition juive, Maïmonide rappelle dans le Michné Torah (Lois des Rois) que le rôle premier du roi est de garantir la sécurité de son peuple. La compassion d’un dirigeant se juge à sa capacité à assurer l’existence de toute la nation, pas seulement à sa sensibilité envers les individus. Émile Durkheim insistait sur la nécessité d’une solidarité morale pour que la société tienne debout. Un accord fondé sur la capitulation devant le terrorisme ne renforce pas cette solidarité: il la brise, il fracture le consensus collectif, il sape la confiance dans les institutions. La vraie question n’est pas de savoir s’il y aura un accord, mais si nous tiendrons à ce principe fondamental: le Hamas doit tomber. Non pas survivre, non pas se reconstruire, non pas rester une option politique future: mais tomber. Comme le disait Kant, la paix véritable est celle où l’ennemi n’a plus la capacité de continuer la guerre. Comme l’expliquait Weber, un État qui renonce à son monopole de la violence cesse d’être un État. Comme l’enseignait Maïmonide, la première responsabilité d’un dirigeant est de protéger son peuple. Le prix sera lourd, la route difficile. Mais l’histoire de notre peuple a connu des sacrifices bien plus grands pour des principes moins essentiels. Face au Hamas, il ne s’agit pas d’un principe abstrait mais d’une condition de survie. La capitulation n’est pas la compassion, l’accord n’est pas une solution, la trêve n’est pas la paix. Israël ne peut se permettre de céder au chantage. Nous ne pouvons pas, en tant que peuple, nous abandonner à l’émotion seule. C’est par la raison, par la clairvoyance et par la fidélité à notre devoir historique que nous devons décider. Céder à l’émotion, c’est céder au chantage. Faire prévaloir la raison, c’est assurer le devenir. Il nous faut tenir bon : non par cruauté mais par responsabilité, non par haine mais par amour de la vie. Le Hamas doit tomber. C’est l’ordre du moment, l’exigence de la morale, et l’impératif de l’histoire.

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