Penser la solitude chez Levinas pour penser la solitude de Levinas, telle sera ici notre tâche. Penser la solitude chez Levinas, car il est d’elle une pensée originaire chez lui : pensée dès le départ au départ par le penseur, elle l’est encore à l’arrivée tant la solitude demeure pour lui une voie sans issue, ni la connaissance, ni la jouissance, ni même l’amour, ne permettant de sortir de cette impasse qu’elle est pour l’être et de cette aporie qu’elle est pour la pensée. Penser la solitude de Levinas car sa pensée d’elle fait de lui un penseur solitaire : pensant la solitude avec l’être, voire avant lui, Levinas parle d’une parole singulière parmi les penseurs, mais d’une voix sans éclat, l’affirmation de la solitude comme horizon, sinon condition et de l’être et de l’altérité et de la socialité n’étant guère audible en philosophie et, a fortiori, en phénoménologie. Certes, ces deux thèses que nous énonçons, l’une sur le moyen, l’autre sur la fin de notre dessein, n’en font qu’une.